jeudi 28 août 2008

Maliki est-il vraiment prêt au retrait américain ?

En fin de semaine dernière, des détails d'un projet d'accord sur la sécurité et la présence américaine ont été révélés à la presse. Des représentants américains et irakiens évoquaient la possibilité de voir toutes les troupes américaines redéployées d'ici fin 2011. Les forces de combat seraient retirées d'ici le 30 juin 2009, tandis que des militaires resteraient pour entraîner et superviser l'armée irakienne jusqu'au 31 décembre 2011.

Si l'accord venait à être finalisé en ces termes, ce serait la première fois que l'administration américaine émet officiellement un plan de retrait. Les négociations se fondent sur une dynamique assez simple, relate le New York Times. Le gouvernement chiite exige un plan de retrait sans quoi il ne légalise pas la présence militaire américaine après l'expiration du mandat des Nations Unies à la fin de l'année, renouvelé "une dernière fois" en décembre dernier à la demande du premier ministre Nouri al-Maliki.

Ce dernier s'est exprimé en début de semaine à des chefs de tribu chiites en insistant qu'aucun accord ne pouvait être conclu sans un plan de redéploiement. "Ce n'est pas possible de conclure un accord à moins qu'il ne se fonde sur une souveraineté totale et sur l'intérêt national, et sur le fait qu'aucun soldat étranger ne reste sur le territoire irakien après une période de temps définie", a-t-il affirmé, selon le Times.

Sur le très sérieux blog Abu Muqawama, on s'interroge à savoir pourquoi Maliki s'est senti obligé de mettre les points sur les "i" si explicitement. L'auteur écrit qu'il faut y voir une double position du Premier ministre : il est fort et faible à la fois. Il cherche à asseoir son autorité et sa légitimité au pouvoir. Il est fort à la suite de ses récents succès dans différentes campagnes militaires, notamment à Bassora et Sadr City. Il reste faible, car politiquement, il est malmené. Le front chiite est fracturé, les tensions entre Arabes et Kurdes rendent les Kurdes des partenaires politiques incertains et le parti Dawa, auquel il appartient, manque d'une assise populaire.

Cette manifestation publique d'autorité s'inscrit dans une récente suite d'événements, estime Dr. iRaq :
* "les efforts de Maliki d'affaiblir les Sadristes (pas seulement militairement, mais en démentelant leur groupe dans le sud)".
* les efforts de Maliki de contenir l'intégration des Fils d'Irak dans les forces de sécurité (cf. un précédent post sur ce blog).
* les efforts du Premier ministre de consolider son commandement sur différents éléments des forces de sécurité et des services de renseignements, et l'utilisation de plusieurs "centres d'opérations" à Bagdad, Bassora, Ninewa et Diyala pour diriger directement l'armée irakienne, au détriment de la police.
* le positionnement politique de Maliki sur l'accord de sécurité qui sert à accroître son crédit nationaliste en exigeant une date butoire pour un départ américain.

L'auteur du blog explique que si Maliki voulait vraiment le redéploiement des forces de la coalition, il n'aurait qu'à ne pas signer l'accord et forcer les Américains à partir, preuve que le gouvernement irakien n'est pas encore prêt à se débarrasser des Américains. En fait, pense-t-il, les Irakiens sont conscients qu'ils ne peuvent pas assurer la sécurité du pays seuls pour le moment.

Le blog fait référence à une citation extraite du Washington Post émanant d'un représentant du gouvernement irakien anonyme, qui semble attester la thèse que ces dates sont susceptibles de changer en fonction de la situation sur le terrain : "Si vous demandez au Premier ministre, 'Que se passe-t-il si la situation sur le terrain change avant 2011 ?', il répondra clairement que les dates auront peut-être besoin d'être changées".

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