vendredi 9 janvier 2009

La désinformation au coeur du conflit à Gaza

François-Bernard Huyghe, chercheur à l'IRIS, vient de publier une excellente tribune sur le nouveau site d'analyses du centre d'analyses affaires-stratégiques.info. L'analyse porte sur la guerre de l'information qui fait rage entre le Hamas et Israël en se penchant notamment les campagnes menées par l'Etat hébreu et les différentes organisations pro-israéliennes qui travaillent à la cause d'Israël. Voici quelques extraits :

Au moment où nous écrivons, il est impossible de savoir où s’arrêtera l’offensive israélienne à Gaza. Mais une chose est déjà assurée : elle se double d’une guerre de l’information d'un nouveau type.
Son symptôme le plus visible en est le refus de Tsahal de laisser pénétrer les médias internationaux dans la zone de conflit. Alors que sa tradition était plutôt de tenter de séduire les journalistes par des officiers chargés de la communication, anglophones ou francophones et de contact agréable, la stratégie de la transparence semble terminée, comme l’exploitation du thème "nous sommes une démocratie comme vous".


(...)
les responsables militaires israéliens sont tentés d’appliquer la méthode qui avait réussi aux Britanniques dans la guerre des Malouines : "Pas de médias, pas d’images, pas d’ennuis". Certes, il reste sur place des journalistes palestiniens (puisque vivant sur place), mais les responsables israéliens (devenus quelque peu paranoïaques et persuadés que les journalistes sont soit des adversaires, soit des victimes de l’habile "atrocity propaganda" des Palestiniens) se disent sans doute que, tant qu’à subir la version adverse, au moins elle apparaîtra clairement comme telle : sa source "arabe" la rendra peu crédible. Bien entendu, la stratégie qui consiste à couper le robinet à images échouera : à l’ère numérique, les vidéos prise par des amateurs ou les récits de témoins - ne serait-ce que sur les blogs - ne peuvent plus être censurés. Et l’espoir que les événements de Gaza seront sinon ignorés, du moins minorés, à condition qu’il n’y ait pas des "idiots utiles" pour mettre les morts civiles sur l’agenda des médias est plus qu’une utopie. Les images et les textes dérangeants passeront (y compris ceux issus de source israélienne hostile à la guerre).

(...)
Il s’agit d’un procédé qui n’est pas nouveau : la métapropagande, ou accusation portée contre toute information venant du camp adverse ou favorable aux ennemis d’être en réalité du mensonge et de la propagande. Le principe est "Ils font de la propagande, nous disons la vérité" et son corollaire : "Tout ce qui dessert notre cause a été fabriqué par des manipulateurs ; il faut être naïf pour y croire.". La méthode est d’autant plus efficace qu’elle s’appuie souvent sur un pseudo-effet d’évidence cher aux conspirationnistes : "mais regardez cette photo, vous n’allez pas croire que tel détail soit vraisemblable", même si le spectateur naïf ne voit vraiment rien qui contredise les lois de la physique ou de la vraisemblance. D’autant plus que le public échaudé par quelques trucages notoires (les faux cadavres torturés de Timisoara pendant la révolution roumaine de 1990, par exemple) est souvent enclin à croire que tout n’est qu’illusion et mise en scène. Et tout le monde se souvient des médiamensonges en images des deux guerres du Golfe.

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