mardi 16 juin 2009

Il l'a fait... (mis à jour)

Benjamin Netanyahu a franchi la barrière. Dans un discours très attendu au Begin-Sadat Center for Strategic Studies à Tel Aviv avant-hier, le Premier ministre israélien s'est enfin déclaré en faveur de la solution à deux Etats. Ce discours devait être la pierre angulaire de la politique israélienne sur cette question et il semble bien que la pression américaine et la réalité sur le terrain ont pris le dessus sur le parti pris idéologique du Likoud et de la droite conservatrice israélienne en général.

Il affirme dans un premier temps :

Mais, nous devons dire la vérité dans son intégralité : sur notre territoire vit une importante communauté palestinienne. Nous ne voulons pas les diriger, nous ne voulons pas gouverner leurs vies, nous ne voulons pas leur imposer notre drapeau ou notre culture.

Dans ma vision de la paix, dans ce petit territoire qu'est le nôtre, deux peuples vivent côte à côte librement, en amitié et avec un respect mutuel. Chacun aura son propre drapeau, son propre hymne et son propre gouvernement. Aucun ne menacera la sécurité ou la survie de l'autre.


Plus loin, il lâche le morceau :


Si nous recevons cette garantie concernant la démilitarisation [d'un Etat palestinien] et les besoins de sécurité d'Israël, et si les Palestiniens reconnaissent Israël comme l'Etat du peuple juif, alors nous serons prêts pour un futur accord de paix en vue de trouver une solution où un Etat palestinien démilitarisé existerait aux côtés de l'Etat juif.


Pour Netanyahu, c'est un énorme pas en avant, puisque c'est la première fois qu'il reconnaît la nécessité d'un Etat palestinien comme un évènement qui serait bénéfique tant pour Israël que pour les Palestiniens. Toutefois, les conditions sont nombreuses et contraignantes :
* La question des réfugiés doit être réglée, mais hors des frontières d'Israël. C'est un dossier qui, jusqu'au bout, restera épineux, plus du côté israélien que palestinien d'ailleurs, car il est peu probable que toute la diaspora palestinienne accoure si on leur offre la possibilité de revenir.
* La reconnaissance du caractère juif d'Israël est problématique, car cela aliène les Arabes non-juifs qui vivent en Israël.
* La démilitarisation de l'Etat pourrait être une solution, mais comment la mettre en place ? Comment les Palestiniens pourraient-ils être assurés de leur sécurité et de leur indépendance s'ils ne peuvent pas compter sur une armée lorsque nécessité fait loi ? Et surtout, dans le contexte actuel, comment démilitariser le Hamas ?

Un autre point important, selon moi, de son discours est l'ouverture qu'il fait aux Etats arabes. Il les encourage à dynamiser l'économie palestinienne autant que faire ce peut, mais il leur tend la main pour discuter de la paix entre eux :

Je me tourne vers les dirigeants arabes ce soir et je leur dis : "Rencontrons nous. Parlons de la paix et faisons la paix. Je suis prêt à vous rencontrer n'importe quand. Je suis prêt à aller à Damas, à Riyadh, à Beyrouth, n'importe où, même à Jérusalem".

Il faudra voir comment cela prend forme politiquement et si Netanyahu pourra soutenir de telles positions dans une coalition gouvernementale fragile et franchement pas partisane de ces options, mais le Premier ministre a fait un premier pas.

***UPDATE***

En relisant mon post et à la lecture d'autres articles, je me demande si je ne me suis finalement pas trop focalisé sur l'énonciation par Netanyahu de l'objectif de la solution à deux Etats. Stephen Walt, certes c'est Walt et on connait bien ses positions, a fait quelques commentaires sur le discours du Premier ministre israélien. Pour lui, c'est presque une charade. Bibi n'a fait que répondre à Barack Obama en offrant le strict minimum. Les conditions posées sont inacceptables pour les Palestiniens, il ne fait aucune mention de l'Initiative de Paix de la Ligue Arabe, il ne fait pas mention des politiques d'Israël qui ont peut-être un rôle dans la situation actuelle, il présente le peuple juif comme opprimé et le peuple arabe comme vengeur... Une longue liste.

Selon lui, on peut tirer trois leçons du discours d'Obama et de celui de Netanyahu :

1. La pression américaine peut marcher sur Israël

2. Le chemin à parcourir est long et le gouvernement israélien fera tout pour ralentir le processus, espérant dans le même temps qu'Obama se tourne vers d'autres sujets.

3. C'est bien beau tout ça, mais la politique américaine est encore loin d'être équitable dans le dossier.

Je pense qu'il a raison sur certains points, mais il diminue quand même dramatiquement la portée de l'évolution chez Netanyahu. Etait-il obligé de faire un tel positionnement ? Pas sûr. Pourquoi aurait-il dit que les politiques israéliennes qu'il a soutenues sont au moins en partie responsables de la situation actuelle ? Cela aurait été se tirer dans le pied. Pourquoi n'a-t-il pas clairement défini les limites de l'Etat palestinien qu'il entrevoit ? Parce qu'on ne fait pas deux choses à la fois.

Certains commentateurs ont reproché à Obama d'avoir eu un propos trop vague et pas suffisamment spécifique dans son discours du Caire du début du mois. Walt n'en faisait pas partie, mais par contre, il fait partie de ceux qui estiment que le discours de Netanyahu en manquait, alors même que l'intention, quasi identique, était de lancer un mouvement - du moins je l'espère - pas encore de définir précisément les politiques avant même d'être dans la salle de négociations.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Relisez bien le premier extrait que vous citez :

"... sur notre territoire vit une importante communauté palestinienne. .....

.... dans ce petit territoire qu'est le nôtre, deux peuples vivent côte à côte librement, en amitié et avec un respect mutuel. "

il n'évoque pas ici la Cisjordanie et Gaza mais bien l'intérieur même d'Israel.
Ce qui signifie qu'il désire voir les Palestiniens de l'intérieur vivre sousun autre drapeau.

 

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