L'armée de l'air israélienne aurait bombardé un convoi d'armes au Soudan à destination du Hamas. Cette simple phrase a des répercussions incroyables !
L'opération aurait eu lieu dans la deuxième moitié de janvier. Le convoi comportait 17 camions ! 17 camions d'armes, ça commence à être significatif ! Selon des informations fournies par les services de renseignements israéliens à Haaretz, le convoi transportait des missiles anti-chars, des petites armes et des explosifs. Le trajet serait assez complexe. D'Iran, les armes traverseraient le Golfe jusqu'au Yémen avant de partir pour le Soudan et d'arriver à Port Sudan. Ensuite, ils remonteraient jusqu'en Egypte, passeraient par le Sinaï, puis seraient passés en contrebande à Gaza par les tunnels de Rafah. Personne ne s'est prononcée officiellement pour le moment, mais le gouvernement soudanais a admis - via Sudan Tribune basé à Paris et pas forcément très fiable - que l'évènement avait effectivement eu lieu.
Plusieurs points restent à éclaircir. Etait-ce vraiment les Israéliens ? Les premiers rapports de presse faisaient état d'une attaque menée par l'armée de l'air américaine au départ probablement de Djibouti. Ce sont des infos de CBS qui réfutent cette thèse, privilégiant une attaque israélienne. Il n'est en tout cas pas impossible qu'ils aient agi de concert. A la mi-janvier, les Etats-Unis et Israël ont signé un mémorandum de coopération pour lutter contre la contrebande d'armes en direction de Gaza. Poussons le raisonnement plus loin, est-ce que les Français étaient au courant ? Si jamais les avions partaient de Djibouti, cela n'est pas dénué de sens. Après tout, la France y possède sa plus grosse base militaire étrangère. Etait-ce la première attaque ?
Autre question sur le trajet. Comment traverse-t-il toute l'Egypte ? En bâteau ? Par le Nil ? Par la route ? Les autorités égyptiennes seraient-elle donc incapables d'arrêter des convois de cette taille ? (Je ne parle pas des autorités yéménites, qui n'ont de toute manière pas beaucoup de contrôle sur leur territoire.) Selon DebkaFILE - loin d'être une source fiable - les contrebandiers ne se déplaceraient désormais plus en convoi.
Mais, le plus important dans cette histoire, c'est que cet évènement serait la première preuve tangible que l'Iran (qui d'autre?) fournit bien des armes au Hamas via les tunnels de Rafah. Cela confirmerait un secret de Polichinelle, mais non moins un développement important pour faire pression sur l'Iran. Je m'attends à ce que Seymour Hersh se mette en chasse d'une enquête de fond pour en dévoiler plus, mais il va falloir attendre un peu pour cela. Il n'avait pas été particulièrment bon sur le bombardement du site syrien en septembre 2007, espérons qu'il fera mieux cette fois-ci.
Et si tout cela était faux ? Sur le blog Moon of Alabama, l'auteur croit que c'est de la pure propagande. Sudan Tribune n'est pas une source fiable et pourrait travailler pour les intérêts de certains cercles. L'article de CBS est une entrée sur un blog et toute l'histoire est présentée comme "une version semi-officielle". On ne sait pas de qui émanent les révélations. En plus, Dan Raviv qui écrit le post est connu pour ses contacts au sein des services de renseignements israéliens (toutefois, les infos du post ne viennent pas de lui).
J'ajoute que cela arrive à un moment assez particulier, où Omar al-Bachir se rend en visite officielle en Egypte...
A suivre donc...
***UPDATE***
Lors d'une conférence à Herzliya, Ehud Olmert a semblé confirmer l'attaque. Il a déclaré qu'Israël "opérait n'importe où il était possible de mettre à mal l'infrastructure de la terreur de sorte que cela renforce notre force de dissuasion". Et d'ajouter, "il n'y aucune raison de rentrer dans les détails et tout le monde peut utiliser son imagination. Ceux qui ont besoin de savoir savent". Cela ne lève certes pas tout soupçon. Peut-être que cette attaque ne s'est jamais produite et qu'Olmert fait un coup de bluff !
Reuters cite deux représentants soudanais confirmant le bombardement, mais l'article ne donne pas plus de détails que précédemment cités.
Ronen Bergman, souvent très bien informé, a une théorie intéressante sur les frappes au Soudan. Il les place dans un schéma plus large de récents évènements où Israël n'a ni confirmé officiellement, ni infirmé son engagment, mais dont l'implication israélienne semble quasi-certaine. Le bombardement de la centrale nucléaire suspectée en Syrie, l'assassinat du grand ponte Imad Mugniyah en février 2008 et celui du général syrien Suleiman, suspecté d'avoir participé au programme nucléaire et en contact avec le Hezbollah et l'Iran. Pour Bergman, tous ces évènements seraient les indicateurs, que depuis la guerre du Liban en août 2006, Israël cherche avant tout à frapper discrètement et au lieu de s'en prendre à la Syrie ou à l'Iran, ce qui ne servirait à rien, elle cible de manière plus fine.
Il y a juste un point que je ne suis pas dans le raisonnement de Bergman, où place-t-il l'Opération Plomb Durci ? Une exception qui confirme la règle ? Une nécessité politique et militaire ? Une opération discrète qui a pas mal tourné ? Une erreur ? Selon Bergman, l'objectif d'Israël serait d'éviter d'enflammer l'opinion internationale contre elle, d'où cette discrétion. C'est une bonne technique effectivement, sachant que dès qu'Israël confirme officiellement une attaque, c'est un raz-de-marée de protestations internationales. Seuls soucis, il suffit d'un écart, en l'occurence un pavé dans la mare, et que les plans de nouvelles colonies soient révélés dans la presse pour que la discrétion ne tienne plus. Cela dit, ces opérations discrètes sont plus ingénieuses. Quand on marche dans un champ de mines, il vaut mieux prendre ses précautions.
jeudi 26 mars 2009
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1 commentaire:
Vue le nombres d'intérêts et de participants dans ce ''mic mac'' moyent oriental, il ne serait pas étonnant que la main droite ne sache pas ce que fait la main gauche au sein de l'état major israélien.
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