dimanche 24 août 2008
Le plan de Joe Biden pour l'Irak
Le sénateur démocrate du Delaware Joe Biden est donc le colistier de Barack Obama pour la course à la Maison Blanche. C'est une formidable nouvelle. Joe Biden est un homme politique hors pair, un globe trotter sans repos, un baroudeur de Washington. Le point fort du sénateur est la politique étrangère. Il en a fait son cheval de bataille depuis des décennies - ça fait 36 ans qu'il est au Sénat. Il est aujourd'hui président de la commission des affaires étrangères du Sénat. Il y a deux ans, Biden, en collaboration avec Leslie Gelb du Council on Foreign Relations, avait proposé un plan pour résoudre la crise en Irak.
Le contexte de l'époque était catastrophique. Les tensions sectaires étaient à leur comble. On était en quasi état de guerre civile. Arrive Joe Biden avec sa stratégie de créer un Etat fédéral séparé en trois régions autonomes. Dans une tribune au New York Times, Biden et Gelb définissent leur projet en cinq points :
* "établir trois régions en grande partie autonomes avec un gouvernement central viable à Bagdad. Les régions kurde, sunnite et chiite seraient responsables de leurs propres lois locales, de l'administration et de la sécurité intérieure. Le gouvernement central se chargerait de la défense des frontières, des affaires étrangères et des revenus pétroliers."
* "attirer les Sunnites à rejoindre le système fédéral avec une offre qu'ils ne peuvent pas refuser. (...) Diriger leur région devrait être de loin préférable aux alternatives : être dominés par les Kurdes et les Chiites au sein du gouvernement central ou être les principales victimes d'une guerre civile." Le plan prévoyait également de leur garantir 20% des revenus pétroliers pour pallier à la pauvreté du sol de leur région.
* "assurer la protection des droits de la femme et des minorités ethniques et religieuses". L'administration américaine conditionnerait son soutien financier au respect de ces communautés.
* "Le président doit exiger de l'armée qu'elle dresse un plan de retrait et de redéploiement des troupes d'Irak d'ici 2008 (en conservant une présence réduite mais efficace pour combattre le terrorisme et assurer l'honnêteté des voisins). Nous devons éviter un retrait précipité qui conduirait à une explosion nationale, mais nous ne pouvons pas maintenir une présence militaire américaine sur le long terme."
* "sous une tutelle internationale ou des Nations Unies, nous devons convenir d'une conférence régionale pour garantir le respect des frontières irakiennes et de son système fédéral."
Dans une tribune au Washington Post il y a tout juste deux ans, Biden réitérait son plan insistant que ce n'était pas un plan de partition, mais de fédéralisme.
En septembre 2007, le Sénat votait une résolution abondant dans le sens du projet de Joe Biden, un revers pour l'administration Bush, car de nombreux Républicains s'étaient ralliés à cette idée. Le vote était purement symbolique, car la résolution n'était pas contraignante. La résolution a été critiquée par l'administration Bush et par de nombreux hommes politiques irakiens, qui le considéraient comme une partition de l'Irak et une ingérence américaine. Gelb et Biden se sont expliqués dans une tribune au Washington Post début octobre regrettant les déformations de la Maison Blanche et de la classe politique irakienne à propos du plan, répétant qu'il n'était pas question de partition, mais de fédéralisme. Dans la tribune au Times, il ne séparait pas clairement les deux concepts répondant à ceux qui pouvaient affirmer que c'était une partition, qu'une "rupture est déjà en cours".
Aujourd'hui, il est difficile de savoir ce qu'il en est de ce plan et surtout de savoir si Biden maintient tel quel sa position. Son site Internet est inaccessible (aujourd'hui du moins) et il s'est montré discret sur ce sujet ces derniers mois. La décision de nommer Biden a suscité le scepticisme en Irak, car son plan est impopulaire sur place. De plus, la donne a changé, notamment en ce qui concerne les violences sectaires, ce qui pourrait handicaper la viabilité du plan qui se fondait sur un Irak déjà déchiré.
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